Origine des éléments volatils et chronologie de leur accrétion au sein du système solaire interne : Apport de l’analyse in-situ des achondrites

Image these Cecile Deligny

Résumé en français : Les éléments volatils comme l’hydrogène et l’azote contrôlent l’évolution des corps planétaires et de leurs atmosphères, et sont des éléments essentiels au développement de la vie sur Terre. Néanmoins, l’origine des éléments volatils et la chronologie de leur accrétion par les planètes telluriques formées au sein du système solaire interne restent un sujet de débat et de controverse en sciences planétaires. Pour répondre à ces questions, les rapports isotopiques de l’hydrogène (D/H) et de l’azote (15N/14N) sont des outils puissants pour tracer l’origine (solaire, chondritique ou cométaire) des éléments volatils piégés par les planètes telluriques. Pour contraindre l’origine(s) des éléments volatils piégés par les planètes rocheuses, nous avons donc mesuré les teneurs et les compositions isotopiques de l’hydrogène et de l’azote par microsonde ionique (LGSIMS) dans des achondrites (angrites, météorites maritennes et aubrites) qui proviennent d’astéroïdes différenciés ou de planètes qui sont considérés s’être formés dans le système solaire interne. Ces météorites conservent un enregistrement des étapes initiales de la formation de leurs corps parents et peuvent imposer des contraintes quant à l’évolution précoce des éléments volatils planétaires. L’analyse in-situ par SIMS est une technique quasi-non-destructive, qui permet de mesurer la teneur et la composition isotopique des éléments volatils de différentes phases dans des échantillons terrestres, extraterrestres et synthétiques. Le développement récent du protocole d’analyse de l’azote dans les échantillons silicatés par sonde ionique nous permet de caractériser des objets de la taille d’une dizaine de microns, tels que des inclusions vitreuses. Au cours de cette thèse, les éléments volatils ont été mesurés dans des inclusions magmatiques piégées dans des minéraux et dans les verres interstitiels. Bien que l’analyse de l’azote dans des aubrites n’a pas pu aboutir, les analyses réalisées sur des météorites martiennes et des angrites ont permis de mettre en évidence la présence de quantité importante d’eau et d’azote au sein de ces météorites et de leurs corps parent. En particulier, l’étude des angrites et plus précisément de la météorite D’Orbigny nous a permis de mettre en évidence la présence d’eau et d’azote ayant des compositions isotopiques similaires à celles des météorites primitives formées dans le système solaire externe (i.e., chondrites carbonées de type CM). Ces résultats impliquent que ces éléments volatils étaient présents 4 millions d’années après la formation des CAIs (i.e., premiers solides à se former dans le système solaire) dans le système solaire interne et ont pu être piégés par les planètes telluriques lors de leur formation. De plus, l’analyses des météorites martiennes et plus particulièrement de Chassigny a révélé la présence d’azote ayant une composition isotopique enrichie en 15N comparée aux chondrites à enstatite et aux diamants terrestres qui sont supposés représenter la valeur la plus primitive de l’azote sur Terre.

Mots clés : Corps planétaires, SIMS, Système solaire interne, Elément volatils

Résumé en anglais : Volatile elements such as hydrogen and nitrogen control the evolution of planetary bodies and their atmospheres, and are essential elements for the development of life on Earth. Nevertheless, the origin of volatile elements and the timing of their accretion by terrestrial planets formed in the inner solar system remains a subject of debate and controversy in planetary science. To answer these questions, the isotopic ratios of hydrogen (D/H) and nitrogen (15N/14N) are powerful tools to trace the origin (solar, chondritic or cometary) of volatile elements trapped in planetary bodies. Therefore, to constrain the source(s) of volatile elements trapped in rocky planets, we analyzed hydrogen and nitrogen contents and isotopic compositions by ion microprobe (LGSIMS) in achondrites that originate from asteroids or from planets that are assumed to have formed in the inner solar system. These meteorites preserve a record of the initial stages of the formation of their parent bodies and can constrain the early evolution of planetary volatile elements. In-situ analysis by SIMS is a quasi-non-destructive technique, which permits to measure the abundance and the isotopic composition of volatile elements of different phases in terrestrial, extraterrestrial and synthetic samples. The recent development of the protocol of nitrogen analysis in silicate samples by ion probe allows us to target tens of micron-sized objects (i.e., glassy melt inclusions). Volatile elements were measured in melt inclusions trapped in minerals and in interstitial glasses. Although the analysis of nitrogen in aubrites was unsuccessful, the analysis performed on Martian meteorites and angrites revealed the presence of a large amount of water and nitrogen within these meteorites. In particular, the study of angrites and more precisely the meteorite D’Orbigny allowed us to highlight the presence of water and nitrogen having isotopic composition similar to those of the primitive meteorites formed in the outer solar system (i.e., CM-like carbonaceous chondrites). These results imply that these volatile elements must have been present in the inner solar system within the first 4 Ma after CAI formation (i.e., the first solids to form in the solar system) and may have been trapped by the terrestrial planets during their formation. Furthermore, the analysis of Martian meteorites and more particularly of Chassigny revealed the presence of nitrogen with an isotopic composition enriched in 15N compared to enstatite chondrites and terrestrial diamonds which are believed to record the most primitive value of nitrogen on Earth.

Key words : Planetary bodies, SIMS, Inner solar system, Volatiles elements

Composition du jury :

Directeurs de thèse

Dr. Evelyn Füri Université de Lorraine, CRPG, CNRS (France)

Dr. Etienne Deloule Université de Lorraine, CRPG, CNRS (France)

Rapporteurs

Dr. Lydie Bonal Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble, OSUG (France)

Dr. Ghylaine Quitté Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie, CNRS (France)

Examinateurs

Dr. Anne Peslier Jacobs, NASA-Johnson Space Center (USA)

Dr. Laurent Remusat Institut de Minéralogie, de Physique des Matériaux et de Cosmochimie, MNHN, CNRS (France)

Prof. Bernard Marty Université de Lorraine, CRPG, CNRS (France)